Décision obtenue par le cabinet – refus de titularisation d’un agent stagiaire : annulation d’une décision refusant de titulariser un fonctionnaire stagiaire à l’issue de son stage.

 

Refus de titulariser un agent public stagiaire à l’issue de son stage

Par un jugement n°2302799 du 21 mai 2024, consultable ici, le tribunal administratif de Rouen a annulé une décision refusant de titulariser un agent public stagiaire à l’issue de son stage pour vice de procédure et erreur manifeste d’appréciation.

Cet agent, adjoint administratif stagiaire, avait été licencié en fin de stage et radié des effectifs à compter du 6 juillet 2023.

Cette décision devait s’analyser comme le refus de titulariser un agent en fin de stage et sa radiation des effectifs pour ce motif.

Cette décision était toutefois entachée d’illégalité tant externe qu’interne, pour être affectée d’un vice de procédure d’une part, et d’erreur manifeste d’appréciation d’autre part.

 

D’une part, sur le vice de la procédure,

Il résulte des dispositions des articles 37-1 et 35 du décret du 17 avril 1989  que lorsqu’elle envisage de refuser la titularisation d’un agent stagiaire à l’issue de son stage initial ou, le cas échéant, de son stage complémentaire, au motif que ses services n’auraient pas donné satisfaction, l’autorité territoriale doit communiquer à la commission administrative paritaire, préalablement consultée pour avis, les pièces et documents nécessaires pour se prononcer sur les aptitudes professionnelles de l’intéressé.

En l’espèce, il était constant que l’administration n’avait communiqué à la commission administrative paritaire (CAP) aucun élément relatif à la manière de servir de l’agent, en particulier le rapport intermédiaire sur sa manière de servir établi le 14 décembre 2022 par sa supérieure hiérarchique, seule appréciation quant à sa manière de servir durant ce stage.

Dans ces conditions, ladite commission n’a pas disposé des documents nécessaires pour se prononcer sur les aptitudes professionnelles de l’agent et n’a pas été mise à même d’émettre son avis en toute connaissance de cause.

Ainsi, comme le soutenait l’agent, cet avis, au demeurant non communiqué, a été irrégulièrement émis, de sorte que l’arrêté contesté du 4 juillet 2023 refusant de le titulariser était entaché d’un vice de procédure.

 

D’autre part, sur l’erreur manifeste d’appréciation,

Un agent public ayant, à la suite de son recrutement ou dans le cadre de la formation qui lui est dispensée, la qualité de stagiaire, se trouve dans une situation probatoire et provisoire.

La décision de ne pas le titulariser en fin de stage est fondée sur l’appréciation portée par l’autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne.

L’autorité compétente ne peut donc prendre légalement une décision de refus de titularisation, qui n’est soumise qu’aux formes et procédures expressément prévues par les lois et règlements, que si les faits qu’elle retient caractérisent des insuffisances dans l’exercice des fonctions et la manière de servir de l’intéressé.

 

Légalité d’une décision de refus de titularisation

Pour apprécier la légalité d’une décision de refus de titularisation, il incombe au juge de vérifier qu’elle ne repose pas sur des faits matériellement inexacts, qu’elle n’est entachée ni d’erreur de droit, ni d’erreur manifeste dans l’appréciation de l’insuffisance professionnelle de l’intéressé, qu’elle ne revêt pas le caractère d’une sanction disciplinaire et n’est entachée d’aucun détournement de pouvoir.

Si la décision refusant de titulariser un agent à la fin du stage n’est pas au nombre de celles qui doivent être motivées en application de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration, il appartient à l’administration de révéler, sous le contrôle du juge en cas de contestation, les motifs fondant une telle décision, lesquels doivent être matériellement établis.

En l’espèce, pour refuser de titulariser l’agent à l’issue de son stage, l’autorité administrative s’était fondée sur son prétendu « comportement dangereux » tel qu’il ressortait d’un jugement correctionnel l’ayant condamné pour des faits de violence sans incapacité et de harcèlement sur son ancien concubin qui se trouvait être son ancien supérieur hiérarchique, et de l’expertise psychiatrique réalisée dans le cadre de la procédure pénale.

Cette décision de ne pas titulariser l’agent avait été prise sur le seul fondement du jugement correctionnel comportant la retranscription indirecte des conclusions d’une expertise psychiatrique réalisée le 25 avril 2022, diligentée au motif que l’intéressé avait fait l’objet de trois hospitalisations en soins psychiatriques à l’époque des faits.

Il était établi que l’agent avait adopté un comportement inadapté à l’égard de son ancien concubin et supérieur hiérarchique, comportement qualifié pénalement de harcèlement par ancien concubin.

L’agent avait reconnu et regretté les faits réprimés par le juge pénal, sa condamnation ayant au demeurant été dispensée d’inscription au bulletin n°2 de son casier judiciaire.

Ces faits, intervenus dans un contexte de séparation conflictuelle et alors que l’agent se trouvait dans un contexte de fragilité, étaient anciens, datant de deux ans, n’avaient pas été commis dans l’exercice de ses fonctions par l’intéressé, mais dans un cadre privé, et étaient isolés dans une carrière de quatre ans au sein de l’administration.

Pour regrettables qu’ils soient, ces seuls faits, qui sont isolés et sont intervenus dans un contexte particulier, n’étaient pas suffisants pour prêter à l’agent, comme le faisait l’administration, des « comportement et caractère dangereux » justifiant « de ne pas exposer l’ensemble des autres agents à ses comportements, ni les personnels des autres collectivités qu’il pourrait être amené à côtoyer sur l’ensemble de sa carrière ».

Aucun élément du dossier ne permettait d’affirmer que l’agent était une personne dangereuse pour les agents de l’administration concernée et de manière générale pour les agents d’autres employeurs publics.

La retranscription indirecte de l’expertise judiciaire du 25 avril 2022 n’était, à elle seule, pas suffisante pour établir la prétendue dangerosité de l’agent alors que l’administration ne rapportait aucun exemple de manifestation d’une telle dangerosité au sein du service.

En estimant qu’en raison des faits précités l’agent ne possédait pas les qualités nécessaires pour être titularisé, alors qu’il ressortait des pièces du dossier que l’intéressé présentait les qualités professionnelles techniques et relationnelles attendues d’un adjoint administratif, l’autorité administrative a fait une appréciation manifestement erronée de son aptitude professionnelle.

 

Annulation de la décision refusant de titulariser l’agent stagiaire

Sur la base d’une argumentation convaincante suivie par le tribunal, l’agent a sollicité et obtenu l’annulation de la décision refusant de le titulariser et l’injonction adressée à l’administration de le réintégrer en qualité de stagiaire et de réexaminer sa situation.

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