Un agent admis d’office à la retraite pour invalidité peut bénéficier de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE).

Jurisprudence relative à la mise à la retraite pour invalidité comme hypothèse de privation involontaire d’emploi ouvrant droit au bénéfice de l’allocation chômage

Il ressort d’une décision du Conseil d’Etat du 30 mars 2023 (CE, 30/03/2023, n°460907) que seul l’agent admis d’office à la retraite pour invalidité, donc à l’initiative de l’employeur, peut prétendre au bénéfice de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) ; l’agent ayant sollicité sa mise à la retraite pour invalidité ne peut y prétendre.

 

Le cadre juridique applicable

 

D’une part,

Aux termes de l’article l. 5421-1 du code du travail :  » en complément des mesures tendant à faciliter leur reclassement ou leur conversion, les personnes aptes au travail et recherchant un emploi ont droit à un revenu de remplacement dans les conditions fixées au présent titre. ».

Aux termes de l’article l. 5424-1 de ce code :  » ont droit à une allocation d’assurance dans les conditions prévues aux articles l. 5422-2 et l. 5422-3 : / 1° les agents fonctionnaires et non fonctionnaires de l’etat et de ses établissements publics administratifs, les agents titulaires des collectivités territoriales ainsi que les agents statutaires des autres établissements publics administratifs ainsi que les militaires ; / 2° les agents non titulaires des collectivités territoriales et les agents non statutaires des établissements publics administratifs autres que ceux de l’etat et ceux mentionnés au 4° ainsi que les agents non statutaires des groupements d’intérêt public  () ».

Aux termes de l’article l. 5424-2 du même code : « les employeurs mentionnés à l’article l. 5424-1 assurent la charge et la gestion de l’allocation d’assurance. Ceux-ci peuvent, par convention conclue avec l’opérateur france travail, pour le compte de l’organisme mentionné à l’article l. 5427-1, lui confier cette gestion ».

L’article 1er de l’annexe a au décret n°2019-707 du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance chômage prévoit que :  » le régime d’assurance chômage assure un revenu de remplacement dénommé  » allocation d’aide au retour à l’emploi « , pendant une durée déterminée, aux salariés qui remplissent des conditions relatives au motif de fin du contrat de travail et à la durée d’affiliation, ainsi que des conditions d’âge, d’aptitude physique, de chômage, d’inscription comme demandeur d’emploi et de recherche d’emploi « .

Ces dispositions sont applicables aux agents publics dans les conditions prévues par l’article l. 5424-1 du code du travail.

Il appartient aux employeurs qui assurent la charge et la gestion de l’indemnisation de leurs agents en matière d’allocation d’aide au retour à l’emploi de s’assurer, lorsqu’ils demandent le bénéfice de cette allocation, qu’ils remplissent l’ensemble des conditions auxquelles son versement est subordonné.

Un ancien agent public satisfait à la condition d’aptitude à l’emploi, à laquelle l’ouverture du droit à l’allocation d’aide au retour à l’emploi (are) est subordonnée en vertu de l’article l. 5421-1 du code du travail, aussi longtemps qu’il demeure inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi mentionnée à l’article l. 5421-3 du même code.

L’ancien employeur ne peut utilement opposer à l’intéressé l’avis concluant à son inaptitude totale et définitive à toutes fonctions émis par le conseil médical dans le cadre de la procédure préalable à sa mise à la retraite d’office pour invalidité, cette procédure étant indépendante de celle selon laquelle s’apprécie l’aptitude au travail des personnes involontairement privées d’emploi. Il lui revient, le cas échéant, de saisir le préfet, qui est compétent en vertu de l’article r. 5426-1 du code du travail pour contrôler l’aptitude physique au travail de l’intéressé.

Le juge de l’excès de pouvoir contrôle l’appréciation de la qualification juridique de la perte involontaire d’emploi opérée par l’autorité administrative, en application de la décision du Conseil d’Etat du 2 avril 2021, n° 428312.

 

D’autre part,

Aux termes de l’article l. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite :  » le fonctionnaire civil qui se trouve dans l’incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d’infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d’une ou plusieurs personnes et qui n’a pu être reclassé dans un autre corps en application de l’article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d’office à l’expiration d’un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si cette dernière a été prononcée en application de l’article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ainsi que du deuxième alinéa des 2° et 3° de l’article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée () ».

Aux termes de l’article l. 28 du même code :  » le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l’article l. 27 a droit à une rente viagère d’invalidité cumulable, selon les modalités définies à l’article l. 30 ter, avec la pension rémunérant les services () « .

Aux termes de l’article l. 29 du même code :  » le fonctionnaire civil qui se trouve dans l’incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d’une invalidité ne résultant pas du service et qui n’a pu être reclassé dans un autre corps en application de l’article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d’office () ».

Il résulte de ces dispositions que la mise à la retraite d’office d’un fonctionnaire civil constitue un cas de perte involontaire d’emploi pouvant ouvrir droit, pour un agent public, lorsque les autres conditions en sont remplies, à une allocation d’assurance telle que prévue à l’article l. 5424-1 du code du travail.

L’agent avait sollicité son admission à la retraite anticipée pour invalidité

En l’espèce, l’agent avait sollicité son admission à la retraite anticipée pour invalidité, de sorte qu’il ne pouvait être regardé comme ayant été involontairement privé d’emploi et ne pouvait ainsi prétendre à l’allocation chômage.

Dans l’affaire commentée, Mme A, adjointe technique territoriale de 1ère classe employée par un département, avait été placée en congé de longue durée à compter du 1er juin 2010.

Par un courrier du 15 septembre 2014, elle a sollicité de l’autorité territoriale la prolongation de son congé de longue durée jusqu’au 15 août 2015 puis son admission à la retraite anticipée pour invalidité à compter du 1er septembre 2015.

Mme A a été, par un arrêté du 7 août 2015, admise à la retraite pour invalidité à compter du 1er septembre suivant.

Mme A s’est ensuite inscrite sur la liste des demandeurs d’emploi à compter du 29 décembre 2015.

Par un courrier du 4 septembre 2017, elle a demandé au département de lui accorder le bénéfice de l’allocation d’aide au retour à l’emploi, qui lui a été implicitement refusée.

Dans cette décision du 30 mars 2023, le conseil d’etat est venu préciser que seule la mise à la retraite d’office constitue un cas de perte involontaire d’emploi pouvant ouvrir droit, pour un agent, lorsque les autres conditions en sont remplies, au bénéfice de l’allocation d’aide au retour à l’emploi.

En l’espèce, dès lors que l’agent avait sollicité son admission à la retraite anticipée pour invalidité, elle ne pouvait être regardée comme ayant été involontairement privée d’emploi et ne pouvait donc prétendre à l’allocation de retour à l’emploi sollicitée.

 

Les agents publics reconnus inaptes physiquement à l’exercice de tout emploi ; Le cabinet conseille les agents :

Il est conseillé aux agents reconnus définitivement inaptes physiquement à l’exercice de tout emploi, donc sans reclassement possible :

  • De laisser leur employeur prendre l’initiative d’une procédure de mise à la retraite d’office pour invalidité et de ne pas formuler de demande de mise à la retraite dans ce cadre ;
  • De solliciter de leur employeur, au moment de la radiation des cadres, la délivrance de l’attestation employeur prévue à l’article r. 1234-9 du code du travail, que l’employeur est tenu de délivrer à l’agent ainsi qu’à france travail ;
  • De s’inscrire dès que possible, à compter de la radiation des cadres, auprès de france travail sur la liste des demandeurs d’emploi et d’interroger cet organisme sur l’existence éventuelle d’une convention de gestion conclue avec leur employeur (convention par laquelle l’employeur aurait délégué à france travail la gestion de l’indemnisation de ses agents en situation de chômage) ;
  • D’adresser leur demande tendant au bénéfice de l’are à france travail et/ou, en l’absence de convention de gestion, à leur ancien employeur ; france travail, qui peut être saisi en première intention, refusera de faire droit à la demande en l’absence d’une telle convention et l’agent dirigera alors sa demande auprès de son ancien employeur.

 

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