La décision de non-renouvellement du contrat d’un agent, fondée sur ses arrêts de travail répétés – trois arrêts en deux ans, dont deux faisant suite à des accidents de service – constitue une mesure discriminatoire fondée sur l’état de santé de l’intéressé, de nature à engager la responsabilité pour faute de l’administration à son égard.

 

Dans un arrêt n°22TL00577 du 26 mars 2024, la cour administrative d’appel de Toulouse a confirmé l’engagement de la responsabilité d’un employeur public en raison de l’illégalité fautive d’une décision de non-renouvellement d’un contrat à durée déterminée d’un agent public constitutive d’une mesure discriminatoire fondée sur son état de santé.

 

Définition et prohibition des discriminations

Aux termes de l’article 1er de la loi du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations :  » Constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son origine, de son sexe, de sa situation de famille, de sa grossesse, de son apparence physique, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son patronyme, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, de son état de santé, de sa perte d’autonomie, de son handicap, de ses caractéristiques génétiques, de ses mœurs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales, de sa capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée, une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne l’aura été dans une situation comparable / Constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d’entraîner, pour l’un des motifs mentionnés au premier alinéa, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d’autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés. () « .

 

Regime de preuve applicable à la victime d’une discrimination

Aux termes de l’article 4 de cette même loi :  » Toute personne qui s’estime victime d’une discrimination directe ou indirecte présente devant la juridiction compétente les faits qui permettent d’en présumer l’existence. Au vu de ces éléments, il appartient à la partie défenderesse de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. () « .

Il appartient au juge administratif, dans la conduite de la procédure inquisitoire, de demander aux parties de lui fournir tous les éléments d’appréciation de nature à établir sa conviction.

Cette responsabilité doit, dès lors qu’il est soutenu qu’une mesure a pu être empreinte de discrimination, s’exercer en tenant compte des difficultés propres à l’administration de la preuve en ce domaine et des exigences qui s’attachent aux principes à valeur constitutionnelle des droits de la défense et de l’égalité de traitement des personnes.

S’il appartient au requérant qui s’estime lésé par une telle mesure de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer une atteinte à ce dernier principe, il incombe au défendeur de produire tous ceux permettant d’établir que la décision attaquée repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La conviction du juge, à qui il revient d’apprécier si la décision contestée devant lui a été ou non prise pour des motifs entachés de discrimination, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

 

Caractérisation d’une discrimination en raison de l’état de santé

Dans cette affaire, un agent contractuel qui exerçait les fonctions d’agent de restauration qualifié s’était vu opposer un refus de renouvellement de son contrat à son terme.

Cet agent avait été placé en arrêt maladie à trois reprises le 17 août 2018, le 9 juin 2019 et le 25 juillet 2019, deux de ces arrêts de travail étant dus à des accidents avec un charriot de repas reconnus imputables au service.

L’agent faisait valoir que son employeur lui avait indiqué, dans un entretien en date du 30 août 2019, que la décision de non-renouvellement de son contrat était fondée sur ses arrêts de travail répétés ; l’agent exposait en outre qu’il avait été remplacé le 1er août 2019 par un autre agent contractuel recruté en contrat à durée déterminée.

Par la concomitance entre son troisième arrêt maladie, la décision de non-renouvellement de son contrat à durée déterminée et le recrutement de son remplaçant, par un contrat à durée déterminée, l’agent apportait des éléments permettant de présumer l’existence d’une discrimination fondée sur son état de santé.

En réponse, l’employeur auquel il incombait de produire une argumentation en sens contraire, ne démontrait pas que la décision de non-renouvellement du contrat à durée déterminée avait été prise dans l’intérêt du service ou qu’elle reposait sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Dans ces conditions, la décision de ne pas renouveler le contrat de l’agent constituait une mesure discriminatoire fondée sur son état de santé et par conséquent la responsabilité pour faute de employeur était engagée à son égard.

 

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