Décision obtenue par le cabinet – retraite d’office pour invalidité : retrait d’une décision plaçant d’office un agent à la retraite pour invalidité illégale en l’absence d’avis préalable de la CNRACL.

 

Par une décision du 21 mars 2024, consultable ici, le cabinet a obtenu de l’administration le retrait d’une décision portant mise à la retraite d’office pour invalidité.

Cet agent, adjoint technique territorial employé par une commune, a été placé en congé de maladie ordinaire (CMO) pendant un an à compter du 14 juin 2022 en raison de troubles anxio-dépressifs.

Le 15 novembre 2023, le conseil médical départemental a émis un avis défavorable à la demande de l’agent tendant au bénéfice d’un congé de longue maladie (CLM), motif pris d’une présomption d’inaptitude totale et définitive à tous postes à compter du 13 octobre 2023, date de l’expertise par un médecin agréé ayant conclu à une inaptitude totale et définitive à toutes fonctions.

Le conseil médical a préconisé, dans son avis du 15 novembre 2023, d’une part, l’engagement d’une procédure d’admission à la retraite pour invalidité et, dans ce cadre, la saisine de l’instance en formation plénière et, d’autre part, le placement de l’agent en disponibilité d’office à compter du 14 juin 2023, à l’expiration de ses droits statutaires à congés de maladie, pour une durée de douze mois dans l’attente des avis du conseil médical et de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL).

Le 11 janvier 2024, le conseil médical a émis un avis favorable à la mise à la retraite pour invalidité de l’intéressé.

Sans avoir recueilli l’avis conforme de la CNRACL, l’administration a, par un arrêté du 29 janvier 2024, notifié par courriel du même jour, prononcé la mise à la retraite d’office pour invalidité de l’agent à compter du 1er mars 2023 et sa radiation des cadres à compter de cette même date.

Cette décision était toutefois manifestement illégale comme entachée d’incompétence de son auteur dès lors qu’elle n’avait pas été précédée de l’avis conforme de la CNRACL.

 

Retraite d’office pour invalidité : le cadre juridique applicable

D’une part,

Aux termes de l’article L. 822-1 du code général de la fonction publique : « Le fonctionnaire en activité a droit à des congés de maladie lorsque la maladie qu’il présente est dûment constatée et le met dans l’impossibilité d’exercer ses fonctions » et de l’article L. 822-2 du même code : « La durée totale des congés de maladie peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs ».

Aux termes de l’article L. 514-4 de ce code : « La disponibilité d’un fonctionnaire est prononcée soit à la demande de l’intéressé, soit d’office au terme des congés pour raisons de santé prévus au chapitre II du titre II du livre VIII ».

Aux termes de l’article 17 du décret n°87-602 du 30 juillet 1987 : « Lorsque le fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d’une durée totale de douze mois, il ne peut, à l’expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l’avis favorable du conseil médical réuni en formation restreinte. En cas d’avis défavorable, s’il ne bénéficie pas de la période de préparation au reclassement prévue par le décret du 30 septembre 1985 susvisé, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s’il est reconnu définitivement inapte à l’exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis du conseil médical réuni en formation plénière. Le paiement du demi-traitement est maintenu, le cas échéant, jusqu’à la date de la décision de reprise de service, de reclassement, de mise en disponibilité ou d’admission à la retraite ».

Il résulte de ces dispositions que, lorsque l’agent a épuisé ses droits à un congé de maladie, il appartient à la collectivité qui l’emploie, d’une part, de saisir le conseil médical, qui doit se prononcer sur sa mise en disponibilité, son reclassement dans un autre emploi ou son admission à la retraite, et, d’autre part, de verser à l’agent un demi-traitement dans l’attente de la décision prise après avis de cette commission et avis conforme de la CNRACL.

 

D’autre part,

Aux termes de l’article 30 du décret n°2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, alors applicable :  » Le fonctionnaire qui se trouve dans l’impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d’office, soit sur demande () « .

Aux termes de l’article 31 du même décret :  » Une commission de réforme est constituée dans chaque département pour apprécier la réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, les conséquences et le taux d’invalidité qu’elles entraînent, l’incapacité permanente à l’exercice des fonctions. () / Le pouvoir de décision appartient dans tous les cas à l’autorité qui a qualité pour procéder à la nomination, sous réserve de l’avis conforme de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. / () « .

Enfin, les dispositions de l’article 36 de ce décret prévoient que lorsque l’impossibilité permanente de continuer les fonctions résulte d’infirmités ou de maladies contractées ou aggravées au cours du service, l’agent mis à la retraite a droit à une pension de retraite d’invalidité.

 

L’administration doit recueillir l’avis de la CNRACL, qui s’impose à elle, avant de mettre un agent à la retraite

Il résulte de ces dispositions que lorsqu’un fonctionnaire territorial, ayant épuisé ses droits aux congés de maladie, de longue maladie et de longue durée, se trouve définitivement inapte à l’exercice de tout emploi, il est admis à la retraite, soit d’office, soit à sa demande, après avis du conseil médical, et que l’autorité territoriale doit, préalablement à la mise à la retraite, obtenir un avis conforme de la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (récemment tribunal administratif Amiens, 25/07/2023, n°2101557).

Il résulte de ces dispositions que, si l’autorité territoriale investie du pouvoir de nomination est compétente pour décider de la mise à la retraite pour invalidité d’un fonctionnaire territorial, sa décision est subordonnée à l’avis conforme de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) (cour administrative d’appel de Nancy, 07/06/2018, n°17NC02274).

 

En l’absence d’avis préalable de la cnracl, la décision de mise à la retraite est illégale

L’absence de recueil de l’avis conforme de la CNRACL préalablement à l’édiction de la décision de mise à la retraite pour invalidité entache celle-ci d’illégalité (cour administrative d’appel de Versailles, 14/12/2006, n°04VE02817).

EN L’ESPÈCE, L’ADMINISTRATION N’AVAIT PAS RECUEILLI L’AVIS PRÉALABLE DE LA CNRACL :

Il résultait de l’instruction que, contrairement à ce que mentionnait l’arrêté litigieux, la décision prononçant la mise à la retraite d’office pour invalidité de l’agent avait été prise sans que l’avis conforme de la CNRACL n’ait été recueilli préalablement, en méconnaissance des dispositions précitées de l’article 31 du décret 26 décembre 2003.

Dès lors, cette décision était entachée d’un vice qui affectait la compétence de l’autorité qualifiée pour la prendre.

Pour ce seul motif, la décision querellée encourait l’annulation.

 

Retrait de la mesure de mise à la retraite d’office et réintégration juridique de l’agent

Sur la base de cette argumentation, l’agent a obtenu de l’administration, sur le fondement des dispositions de l’article L. 243-3 du code des relations entre le public et l’administration, le retrait de la décision de mise à la retraite d’office et, en conséquence, sa réintégration juridique et le rétablissement du versement de son demi-traitement.

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